La Ferme du Gyps (13.2)...
-
La ferme du Gyps...
La Fouine
( -13.2- )
- Marie ? Que se passe-t-il ?
- Je viens de visiter le journalier, il est très mal, ils ont cinq bouches à nourrir et plus de bois, je peux partager le mien, mais j’ai besoin de votre charrette pour le leur porter.
- C’est ton cœur qui parle, Marie, garde ton bois, mes fils vont s'en charger, et puis si le mal que tu dis vient chez nous, alors nous aurons besoin de moins de bois aux forges.
- C’est bien dit Marie, mais si vos fils descendent au village, qu’ils ne s’y arrêtent pas. Demandez à votre femme de venir à la ferme chercher le remède, c’est mieux qu’ils le prennent avant d’aller.
Martinien accepta d’un geste entendu et en refermant la porte, il appela sa femme, la mère va-t’en donc chez la Marie, elle te donnera c’ qu’y faut pour nos gars.
Suzanne est entrée dans la ferme du Gyps, sans crainte, il y avait déjà longtemps qu’elle connaissait la Marie, elle l’avait vu gambader enfant, partageant les jeux de ses garçons dans l’atelier de menuiserie à l’étage, les enfants s’y réfugiaient l’hiver pour profiter de la chaleur des forges situées juste en dessous. Ce qui ne dérangeait pas le menuisier
Elle posa le bidon à lait sur la table et Marie le remplit d’un breuvage odorant, lui recommandant de donner un demi-verre à chacun, matin et soir.
Suzanne s’inquiéta du bébé.
Marie répondit que lui aussi devait boire quelques cuillerées, il suffisait d’y ajouter un peu de miel pour qu’il le prenne sans problème.
Et elle ajouta que Suzanne devait aussi en donner aux ouvriers.
Suzanne jeta un coup d’œil étonné à Marie, mais se garda de faire un commentaire.
Les ouvriers de la taillanderie étaient presque tous arrivés après la guerre, le manque de bras avait obligé le maître des forges à trouver une main d’œuvre qualifiée et il fallait quinze ans pour former un bon tapeur de faux. Suzanne comprit que Marie ne plaisantait pas, elle soignait seulement les nouveaux venus du village, sa haine se nourrissait de sa douleur et les deux probablement ne s’effaceraient qu’avec elle. C’est ‘y pas malheureux que ces vies gâchées. Quand tout cela finirait-il? N’y avait-il donc pas un peu de bonheur sur cette terre pour cette petite?
Suzanne fit une distribution de remèdes, et les ouvriers furent touchés du geste de Marie car l’inquiétude commençait à grandir au village.
Firmin et joseph chargèrent la charrette et descendirent au village, ils s’arrêtèrent devant chez la jeannette, qui surprise regardait le bois sans comprendre.
- La Marie nous a prévenus que le bois manquait chez toi Jeannette, comment va ton homme ce matin ?
- Mieux, ben mieux je le crois sauvé, Dieu bénisse cette femme, elle nous rend l’espoir.
Une fois le bois déchargé, il ajouta à propos :
- La Marie a besoin d’aide, elle demande si la fouine peut venir l’aider à cueillir les herbes.
La gamine, toujours aux aguets, s’empressa d’accepter, suppliant sa mère de dire oui, et bien que Jeannette ne soit pas rassurée de la savoir baguenauder les bois avec Marie elle se dit qu’elle lui devait bien ça.
Joseph fit signe à la petiote de grimper dans la charrette, et Firmin fit faire demi-tour au cheval, c’était un beau comtois, puissant et facile avec ça, né pendant la guerre, le poulain avait échappé aux réquisitions, Firmin se disait qu’il avait eu de la chance que la pouliche mette bas avant que l’armée ne la leur prenne, et que lui et ses frères étaient tous rentrés, il y avait bien l’Eugène qui avait perdu sa jambe, mais il avait encore ses deux bras et il était très bon finisseur de faux.
Les fils du taillandier stoppèrent la charrette devant la ferme du Gyps et la fouine sauta à terre et grimpa les marches, vive comme l’éclair toute à sa joie d’échapper à son quotidien.
Elle passa des heures en compagnie de Marie, elle courait les champs, les bois, à la recherche des herbes magiques.
Marie s’était prise d’affection pour cette gamine qui rompait sa solitude et elle lui transmettait son savoir.
Parfois la tristesse envahissait son regard en songeant à sa fille et à tout ce qu’elle ne partageait pas, mais quand la fouine voyait le regard de Marie se voiler elle inventait une nouvelle pitrerie pour la sortir de sa torpeur.
[...]
🔊: L'extrait d'aujourd'hui lu par alain ...
La nouvelle " La Ferme du Gyps" est publiée sur ce blog avec l'accord de l'Auteure/Éditrice du livre: Pascale FUSTER.
Avertissement
Tout ce qui est écrit est purement imaginaire à l’exception de la beauté des maisons et des sites naturels.
Toute ressemblance avec un individu existant ou ayant existé ne peut être que pure coïncidence.
Sont cités les noms de personnes célèbres qui ont acquis une notoriété publique.
Sont utilisées les images du domaine public.
Les noms de familles sont des lieux-dits du village.
« Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon, aux termes des articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.»
Année publication : 3 -ème trimestre 2020
ISBN : 978-2-9573108-0-7