Lorsqu’un homme n’a pas d’amour,
Rien du printemps ne l’intéresse ;
Il voit même sans allégresse,
Hirondelles, votre retour ;
Et, devant vos troupes légères
Qui traversent le ciel du soir,
Il songe que d’aucun espoir
Vous n’êtes pour lui messagères.
Chez moi ce spleen a trop duré,
Et quand je voyais dans les nues
Les hirondelles revenues,
Chaque printemps, j’ai bien pleuré.
Mais depuis que toute ma vie
A subi ton charme subtil,
Mignonne, aux promesses d’Avril
Je m’abandonne et me confie.
Depuis qu’un regard bien-aimé
A fait refleurir tout mon être,
Je vous attends à ma fenêtre,
Chères voyageuses de Mai.
Venez, venez vite, hirondelles,
Repeupler l’azur calme et doux,
Car mon désir qui va vers vous
S’accuse de n’avoir pas d’ailes.
François Coppée, Les mois