La Ferme du Gyps (14.2)...
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La ferme du Gyps...
Épidémie
( -14.2 - )
Aidée de Nanette, elle a changé les draps et la chemise du malade. Marie a passé la nuit à son chevet, il délirait le pauvre garçon, au petit matin il ouvrait les yeux, le regard vitreux, puis se rendormait aussitôt.
Marie le quitta, elle le laissait aux bons soins de Nanette. Elle le savait sauvé, mais cela avait été juste.
Le jeune homme, ne croyant qu’à la science, n’avait pas voulu avoir recours aux services de Marie.
Sans l’intervention de Martinien, il y serait passé.
C’est pure folie que la croyance des hommes quelle qu’elle soit, il n’en ressort que du malheur murmura Zélie comme pour elle-même.
L’épicerie à droite de l’église était le lieu de rendez-vous des femmes, ce matin-là les conversations allaient bon train « Elle a tué le faïencier »
« Elle a sauvé l’instituteur, »
« Que vont devenir nos petits? »
« Elle nous sauvera, elle est pas si mauvaise, »
« Le jeune Robert Brick était son père ! »
« Si j’avais su ! »
« Je croyais qu’il avait eu un accident ! »
« Elle a dit qu’il l’avait tué ! »
Les commérages allaient et venaient les femmes parlant toutes à la fois, c’est à celle qui aurait le plus de nouvelles à donner. Bonnes ou mauvaises d’ailleurs peu importe.
Puis le flot de mots incohérents s’estompe pour laisser place à un sujet plus grave, comment faire avec les enfants ? « La Jeannette a dit que la Marie avait recommandé que ses petits aillent jouer dehors sans voir les autres » . « Faut faire pareil ». « En tout cas, c’était bien vrai pour l’école, la preuve, ce pauvre instituteur il avait bien failli sauter les piquets ».
La femme du bûcheron décréta qu’à partir de maintenant son fils irait la journée au bois avec le père, plus question qu’il joue avec les autres.
L’épicière se fâcha : Ben dit don’ toi, tu dis que c’est les nôt’es les responsables.
L’humeur des dames changeait au hasard des conversations, chacune se défendant d’être coupable de quoi que ce soit, quand une petite voix dit : « les coupables, ce sont vos hommes ».
Les femmes se turent , l’Henriette avait parlé « la Marie elle a perdu sa petite, mais elle a sauvé ceux de la Jeannette et su ’y du taillandier, alors elle ne laissera pas passer ceux qu’elle a mis au monde, allez donc à vos occupations au lieu de tailler la bavette ».
Henriette était une vieille institutrice en retraite, nommée au village très jeune, elle s'y était mariée et y était restée. Elle possédait une ferme près du manoir où elle louait des chambres aux ouvriers de la taillanderie. Et les femmes pensèrent que l’Henriette tenait ses informations des ouvriers.
Elle se tinrent donc pour dit que leurs progénitures ne risquaient rien. Et cela détendit l’atmosphère; devenant tout à coup plus raisonnable, l’épicière avança - Madame Henriette, vous avez fait la classe à la Marie, vous, elle vous écoutera peut-être? Allez la voir, y faut qu’on sache rapport aux petits.
Henriette n’avait pas eu le bonheur d’être mère mais elle avait toute sa vie eu ceux des autres dans sa classe, alors elle leur a promis d’essayer.
L’épicière a ajouté « Je la payerai si elle veut ».
L’ Henriette l’a foudroyée du regard « Stupide que tu es Ernestine, Marie n’a que faire de ton argent, crois-tu donc qu’elle aurait sauvé le journalier, sinon ce qu’elle veut, c’est justice ».
L’inquiétude remplit à nouveau la pièce, perceptible dans l’air, comme un brouillard sur le Lison.
« Et comment qu’on fait, on n’y comprend rien à ce qui s’est fait, nous autres, les femmes on y était pas ».
« Posez-lui la question » trancha l’Henriette avant de s’en retourner. Elle s’agaçait de ces stupidités et des bavardages stériles de ces cancoines. Ce qui avait tué dans le village? C’était plus sûrement la culpabilité et les remords que cette pauvre Marie.
Malgré son âge avancé, elle décida de pousser jusqu’au Gyps, elle irait voir Marie.
Devant la ferme, elle l’appela voulant épargner à ses vieilles jambes de monter la volée de marches surplombant l’escalier de la cave.
Marie est sortie sur le pas de la porte, elle a reconnu tout de suite la vieille institutrice mais elle n’est pas descendue pour l’accueillir.
La vieille lui demanda du bas des marches ses intentions pour les enfants. Marie ne lui a pas répondu et la vieille a repris le chemin du village en pestant contre cette gamine cabocharde.
La vieille Henriette, n’était jamais intervenue quand les gamins du village s’en prenaient à Marie, qu’elle aille au diable affirma Zélie.
[...]
🔊: L'extrait d'aujourd'hui bientôt lu par Kali Retsuf ... mais en attendant....
La nouvelle " La Ferme du Gyps" est publiée sur ce blog avec l'accord de l'Auteure/Éditrice du livre: Pascale FUSTER.
Avertissement
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Toute ressemblance avec un individu existant ou ayant existé ne peut être que pure coïncidence.
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Sont utilisées les images du domaine public.
Les noms de familles sont des lieux-dits du village.
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Année publication : 3 -ème trimestre 2020
ISBN : 978-2-9573108-0-7